Un polluant atmosphérique courant serait impliqué dans la maladie d’Alzheimer

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La magnétite, un polluant atmosphérique courant, pourrait induire l’accumulation de protéines toxiques et la perte neuronale liées à Alzheimer. Lors d’expériences exposant des souris à des particules de magnétite, une accumulation accrue de plaques amyloïdes et des changements comportementaux ont notamment été observés, en seulement 4 mois d’exposition. Les chercheurs espèrent que l’étude contribuera à l’élaboration de mesures sanitaires et gouvernementales préventives contre la maladie.

La magnétite (Fe3O4) est un polluant atmosphérique provenant des produits de combustion de ressources fossiles tels que le charbon, le pétrole et le gaz naturel. Elle est ainsi couramment retrouvée dans le gaz rejeté par les centrales électriques fonctionnant au charbon, le gaz d’échappement des véhicules ainsi que dans la fumée résultant de la friction des plaquettes de frein et de l’usure des moteurs.

Des études ont montré qu’une fois inhalées, les particules atmosphériques peuvent s’accumuler au niveau des voies respiratoires inférieures pour ensuite migrer dans la circulation systémique, en traversant la barrière alvéolo-capillaire. Ces particules peuvent également atteindre le cerveau en passant par le bulbe olfactif (une petite structure située en bas du cerveau, responsable du traitement des odeurs) et en franchissant ainsi la barrière hématoencéphalique.

Il a été suggéré qu’en pénétrant dans le cerveau, ces particules peuvent être impliquées dans l’étiologie de diverses maladies neurodégénératives, dont Alzheimer. En effet, des quantités anormalement élevées de particules de magnétite ont été relevées dans des échantillons post-mortem de cerveaux de patients. Ces personnes résidaient dans des zones fortement polluées et étaient âgées de 40 à 65 ans au moment de leur décès. À noter que le fer et les oxydes de fer sont naturellement présents dans le cerveau et sont essentiels à de nombreux processus métaboliques. Cependant, leur présence excessive peut s’avérer toxique, induisant notamment des dommages oxydatifs.

D’un autre côté, étant donné que « moins de 1 % des cas d’Alzheimer sont héréditaires, il est probable que l’environnement et le mode de vie jouent un rôle clé dans le développement de la maladie », a déclaré dans un communiqué Cindy Gunawan, de l’Université Technologique de Sydney (UTS), en Australie. Cependant, aucune étude n’a jusqu’à présent exploré la manière exacte dont la magnétite et les particules associées peuvent conduire à la neurodégénérescence liée à Alzheimer.

Dans cette vision, Gunawan et son équipe ont cherché à déterminer les mécanismes biomoléculaires sous-jacents à cette corrélation, dans le cadre de leur nouvelle étude détaillée dans la revue Environment International. Des chercheurs de l’Université de technologie de Sydney, de l’Université de la Nouvelle-Galles du Sud et de l’Institut technologique de Singapour, ont également contribué à la recherche.

Des effets neurodégénératifs indépendants de l’état pathologique

La nouvelle étude visait à mener une investigation in vivo et in vitro, pour analyser les activités biologiques de polluants atmosphériques susceptibles d’être impliqués dans Alzheimer. Les particules de taille inférieure à 1 micron ont particulièrement été ciblées, dont le fer, des particules à base d’hydrocarbures et la magnétite. Pour ce faire, les chercheurs ont exposé des neurones humains ainsi que des modèles murins sains et prédisposés à Alzheimer (génétiquement modifiés) à ces polluants pendant 4 mois.

Les chercheurs ont constaté que la magnétite enclenchait des processus pathologiques couramment associés à Alzheimer chez l’ensemble des modèles. Cela comprenait une perte exacerbée de neurones au niveau de l’hippocampe (essentiel à la mémorisation) et du cortex somato-sensoriel (impliqué dans le traitement des sensations). En revanche, les souris prédisposées à la maladie présentaient une accumulation accrue des plaques amyloïdes caractéristiques de la maladie.

Des changements comportementaux concordant avec les symptômes de la maladie ont également été observés, incluant notamment une augmentation du stress de l’anxiété ainsi que des troubles de la mémoire à court terme. Ces derniers symptômes ont surtout été observés chez les souris génétiquement prédisposées.

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Études comportementales in vivo de souris génétiquement modifiées ou non, suite à l’exposition aux modèles de particules de polluants atmosphériques « IRON », « DE », « MAG » (magnétite). Images de microscopie électronique à transmission (MET) pour l’exposition au (A) fer (B) au DE et (C) à la magnétite. (D) Représentation schématique d’un test de labyrinthe surélevé (EPM) effectué par les souris de l’étude. (E) Le temps passé dans le bras fermé pour les souris de type sauvage exposées aux particules. (F) Temps passé dans le bras fermé pour les souris prédisposées à Alzheimer. © Cindy Gunawan et al.

D’autre part, la magnétite a induit une réponse immunitaire anormalement élevée chez l’ensemble des animaux, ainsi que dans les cultures de neurones humains. Le minéral a déclenché une réponse inflammatoire et un stress oxydatif, entraînant des dommages neuronaux. L’inflammation et le stress oxydatif sont d’ailleurs reconnus en tant que facteurs importants pouvant contribuer à la démence.

Par ailleurs, il est intéressant de noter que « la neurodégénérescence induite par la magnétite est également indépendante de l’état pathologique, avec des signes d’Alzheimer observés dans le cerveau de souris en bonne santé », indique Charlotte Fleming de l’Université de technologie de Sydney, coauteure principale de la recherche. En effet, mis à part l’accumulation de plaques amyloïdes, aucune différence notable n’a été observée dans les effets de l’exposition aux polluants chez les souris saines et malades.

Selon l’équipe, ces résultats pourraient avoir d’importantes implications pour l’élaboration de lignes directrices pour la prévention de la maladie. Les chercheurs suggèrent entre autres d’inclure les particules de magnétite dans les mesures de la qualité de l’air et de prendre des mesures adaptées.

Sources : Environment International

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