Première preuve expérimentale des propriétés quantiques de la lumière

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Représentation artistique de l’interaction photons-électron libre. | SimplySci Animations/Urs Haeusler/the AdQuanta group at the Technion.
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La lumière est décrite à la fois comme une onde et comme une particule, et ce, depuis des décennies. Cette dualité onde-particule découle de la nature classique et quantique des excitations électromagnétiques. Pourtant, jusqu’à présent, toutes les expériences dans lesquelles la lumière interagit avec des électrons libres ont été décrites en considérant la lumière comme une onde. Des chercheurs apportent aujourd’hui des preuves expérimentales révélant la nature quantique de l’interaction entre les photons et les électrons libres.

Il y a environ deux ans, des chercheurs du TechnionIsrael Institute of Technology ont découvert lors de travaux expérimentaux que l’interaction entre un électron libre et la lumière peut maintenir sa cohérence sur des distances cent fois supérieures à la période optique. Parallèlement, deux études théoriques ont prédit un nouveau type d’interaction fondamentale entre la lumière et les électrons libres, révélant les propriétés quantiques de la lumière.

Sur la base de ces travaux, Raphael Dahan, Alexey Gorlach et Ido Kaminer du Technion ont entrepris de rechercher un système dans lequel ils seraient capables d’étudier expérimentalement cette interaction. Leur objectif était de démontrer notamment que les statistiques quantiques de la lumière peuvent altérer l’interaction électron-lumière. Pour ce faire, ils avaient besoin d’un dispositif offrant un meilleur couplage entre l’électron et la lumière et d’une source photonique générant une lumière quantique de la plus haute intensité possible.

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Des statistiques quantiques de photons « imprimées » sur des électrons

Pour obtenir une plus grande efficacité de couplage, l’équipe de chercheurs s’est tournée vers la communauté de recherche dédiée aux accélérateurs sur puce (ACHIP) — un programme dirigé par l’Université de Stanford, qui vise à mettre au point des accélérateurs de particules de petite échelle, adaptés à une utilisation en laboratoire universitaire, à partir d’un laser diélectrique. Les calculs suggéraient que l’efficacité du couplage pouvait être multipliée par cent par rapport à toutes les expériences antérieures.

Ils ont ainsi collaboré avec un groupe de Stanford, qui leur a fourni une structure ACHIP pour leur premier test. « Il s’agissait de la première expérience utilisant une puce silicium-photonique à l’intérieur d’un microscope électronique à transmission », soulignent Kaminer, Dahan et Gorlach. Cette association permet de confiner et de renforcer l’interaction entre la lumière et les électrons. Finalement, d’autres membres de la communauté ACHIP — une équipe dirigée par Peter Hommelhoff à Erlangen, en Allemagne — leur a fourni les structures ACHIP les plus performantes du monde pour réaliser leurs expériences.

expérience interaction photons électrons libres
Un dispositif de photonique au silicium intégré dans un microscope électronique fournit des interactions électroniques efficaces avec la lumière à ondes continues, permettant la détection des statistiques de photons quantiques. (A) Modulation des fonctions d’onde électronique en microscopie électronique à transmission. (B) Interaction électron-lumière hautement efficace. (C) Spectre d’énergie des électrons après interaction avec deux types d’états lumineux : cohérent et thermique. (D) Statistiques photoniques correspondantes reconstruites à partir des spectres mesurés. © R. Dahan et al.

Pour générer une lumière quantique la plus intense possible, les chercheurs ont collaboré avec le groupe Eisenstein du Technion, qui leur a permis d’utiliser un type particulier d’amplificateur optique, capable de modifier les statistiques quantiques des photons de la lumière. Kaminer et ses collègues ont finalement pu dévoiler la nature quantique de l’interaction entre les photons et les électrons libres en modifiant continuellement ces statistiques tout au long de leur expérience et en montrant comment le spectre énergétique des électrons changeait en fonction de cela. En d’autres termes, les statistiques « quantiques » des photons apparaissaient comme des empreintes sur les électrons qui se propageaient, et s’observaient directement dans leur spectre d’énergie.

La principale interaction explorée par les chercheurs est celle qui implique la lumière d’entrée et les électrons libres. Dans leurs expériences, les électrons agissent comme des détecteurs de l’état de la lumière : ainsi, en mesurant leur énergie, les chercheurs ont pu extraire des informations quantiques sur la lumière.

Une découverte qui pourrait mener à de nouveaux outils d’imagerie

Sur la base des articles théoriques dont l’équipe s’est inspirée, les mesures des électrons ne peuvent s’expliquer qu’en quantifiant à la fois l’électron et la lumière. « Ce n’est qu’une fois cette nouvelle théorie utilisée que la concordance avec nos mesures est devenue très bonne », a confirmé Kaminer. À travers leur expérience, les chercheurs ont démontré l’émergence d’une intrication dans l’interaction entre la lumière quantique et un électron libre et le principe de correspondance quantique-classique. « Ce principe montre l’effet d’une marche quantique par l’électron et sa transition vers une marche aléatoire classique », précise le spécialiste.

Pour résumer, lorsque la lumière interagit sous la forme d’une onde (état cohérent), la dynamique électronique résultante est également celle d’une onde — une marche quantique, dans laquelle une phase bien définie est maintenue entre les états d’énergie électronique. En revanche, lorsque la nature particulaire de la lumière devient dominante, la dynamique électronique résultante est également celle d’une particule — soit une marche aléatoire classique.

Kaminer et ses collègues ont ainsi montré qu’il était possible d’utiliser des électrons libres pour mesurer les statistiques quantiques des photons de la lumière. Or, ceci pourrait ouvrir la voie à de nouvelles recherches en physique de la lumière, et au développement de plusieurs nouvelles technologies, notamment dans le domaine de l’imagerie. Les auteurs de l’étude évoquent par exemple des outils d’imagerie non destructifs et non invasifs, capables de recueillir des images à haute résolution.

Ces travaux de recherche montrent qu’il est envisageable de façonner temporairement des électrons à l’aide d’une lumière à ondes continues. Il serait ainsi possible d’intégrer des puces photoniques au silicium dans les microscopes électroniques afin d’en améliorer les capacités, par exemple, pour introduire une résolution temporelle de l’ordre de l’attoseconde (10-18 seconde) dans les microscopes de pointe sans nuire à leur résolution spatiale.

Kaminer, Dahan et Gorlach prévoient désormais de poursuivre leurs recherches dans deux directions principales : « La première consiste à travailler à la tomographie d’état quantique complet des champs proches photoniques, comme la mesure de l’écrasement de la lumière sur la puce sans avoir besoin de découpler la lumière. Une autre direction que nous examinons est la création de lumière quantique à l’aide d’électrons de forme cohérente », précisent-ils.

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