Une expérience révèle les effets d’une heure passée en forêt sur le cerveau

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Plusieurs études ont montré une association entre la vie urbaine et un risque accru de troubles mentaux tels que les troubles anxieux, la dépression et la schizophrénie. Il est par conséquent essentiel de comprendre comment l’exposition aux environnements urbains et naturels affecte la santé mentale et le cerveau. Une équipe de l’Institut Max Planck pour le développement humain s’est penchée sur la question : dans une nouvelle étude, elle montre comment une heure passée dans la nature peut suffire à diminuer le stress.

Le cerveau humain est depuis toujours façonné par son environnement. Aujourd’hui, plus de la moitié de la population mondiale vit dans les villes, et ce nombre devrait frôler les 70% d’ici 2050. Or, il a été démontré que vivre en ville constitue un facteur de risque pour la santé mentale : l’anxiété, les troubles de l’humeur, la dépression majeure et la schizophrénie sont jusqu’à 56% plus fréquents en milieu urbain qu’en milieu rural.

À l’opposé, un nombre croissant de recherches a démontré les avantages cognitifs et affectifs de l’exposition aux environnements naturels. Il a notamment été démontré que l’exposition à la nature améliore la capacité de mémoire de travail, favorise la restauration de l’attention et permet de soulager le stress. Les preuves de ces effets bénéfiques ont été observées tant par des évaluations psychologiques que par des indicateurs physiologiques (fréquence cardiaque, taux de cortisol, etc.).

Un effet prouvé sur les régions cérébrales impliquées dans la gestion du stress

Il a été démontré que l’amygdale — un noyau cérébral impliqué dans la gestion du stress et servant en quelque sorte de « système d’alerte » — est plus active lors d’une tâche de stress social chez les citadins que chez les ruraux. Cependant, aucune étude n’a jusqu’à présent examiné les effets causaux des environnements naturels et urbains sur les mécanismes cérébraux liés au stress. Comment savoir si le soulagement du stress après avoir été dans la nature est le résultat de l’exposition à l’environnement naturel lui-même ou simplement de l’absence d’effets urbains néfastes ?

Pour en savoir plus, des chercheurs ont mené une nouvelle étude portant sur l’activité cérébrale — en particulier dans les régions du cerveau liées au stress — avant et après une exposition d’une heure à des environnements naturels ou à des environnements urbains. Les régions cérébrales d’intérêt comprenaient l’amygdale, le cortex cingulaire antérieur et le cortex préfrontal dorsolatéral, précisent les chercheurs dans Molecular Psychiatry.

L’équipe a recruté 63 participants en bonne santé, dont 29 femmes ; leur activité cérébrale a été examinée par imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), avant la promenade (effectuée dans la forêt de Grunewald ou dans une rue animée du centre-ville de Berlin). Ils devaient également remplir des questionnaires, dont certains items étaient spécifiquement conçus pour induire un stress social. À noter que les participants n’ont pas été informés de l’objet de la recherche.

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a) L’activité de l’amygdale lors de l’observation de visages effrayants (a) et de visages neutres (b) a largement diminué après la promenade en forêt. (BOLD = Blood-Oxygen Level-Dependent) c) Localisation de l’amygdale. En bas : exemple de visages exprimant la peur ou neutre, utilisés dans l’expérience. © S. Sudimac et al.

Équipés de bracelets mesurant divers paramètres physiologiques, ils ont dû suivre un itinéraire spécifique, sans s’écarter du parcours ni utiliser leur téléphone portable en cours de route, pour éviter toute distraction potentielle. Après leur promenade, chaque participant a passé une autre IRMf, puis effectué une tâche supplémentaire induisant du stress. Les résultats de l’étude ont révélé que l’activité de l’amygdale diminuait après la marche dans la nature, alors qu’elle restait stable après la promenade en environnement urbain. La nature a donc des effets bénéfiques sur les régions cérébrales liées au stress.

Des résultats utiles pour les politiques d’aménagement urbain

Il s’agit de la première étude à prouver le lien de causalité entre la nature et la santé mentale. « Il est intéressant de noter que l’activité cérébrale après la promenade en ville dans ces régions est restée stable et n’a pas augmenté, ce qui va à l’encontre de l’idée communément admise selon laquelle l’exposition à la ville provoque un stress supplémentaire », souligne Simone Kühn, cheffe du groupe Lise Meitner pour les neurosciences environnementales à l’Institut Max Planck pour le développement humain.

Si une courte promenade dans la nature suffit à provoquer des effets positifs sur les régions cérébrales impliquées dans la gestion du stress, cette approche pourrait constituer une mesure préventive efficace contre la tension mentale et potentiellement la maladie. Elle pourrait également amortir l’impact potentiellement désavantageux de la vie en ville sur le cerveau.

Simone Kühn et ses collaborateurs avaient d’ores et déjà montré, dans une étude publiée en 2017 dans Scientific Reports, que les citadins vivant à moins d’un kilomètre d’une forêt avaient une structure amygdalienne physiologiquement plus saine et étaient donc vraisemblablement plus résistants face au stress. Une étude japonaise a également montré que marcher dans une forêt, ainsi que s’y asseoir et la contempler, conduisent à une réduction de la concentration d’hémoglobine préfrontale, une observation qui a été interprétée comme un signe de relaxation.

Afin d’étudier les effets bénéfiques de la nature sur différentes populations et différents groupes d’âge, Kühn et son équipe travaillent actuellement sur une autre étude visant à déterminer l’impact d’une promenade d’une heure dans des environnements naturels et urbains sur le stress des mères et de leurs bébés. En attendant ces résultats, la présente étude confirme à nouveau l’importance pour les politiques d’aménagement urbain de créer des espaces verts plus accessibles dans les villes, afin d’améliorer la santé mentale et le bien-être des citoyens.

Source : S. Sudimac et al., Molecular Psychiatry

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