L’activité physique régulière est unanimement reconnue pour ses multiples bienfaits, allant de la prévention des maladies chroniques au maintien d’une bonne santé globale. Une étude récente suggère par exemple qu’une simple marche de 5 000 pas par jour peut réduire le risque de dépression. Chez les personnes diabétiques ou prédiabétiques, l’exercice revêt une importance particulière, agissant en harmonie avec une alimentation équilibrée et d’éventuels traitements médicaux. Une nouvelle étude révèle que l’activité physique stimule, à court terme, des cellules cérébrales associées à l’insuline et impliquées dans la prédisposition à la démence.
L’insuline, hormone clé de la régulation de la glycémie, joue un rôle fondamental dans le métabolisme en ciblant principalement les muscles squelettiques et les tissus adipeux. En circulant dans le cerveau, elle améliore le flux sanguin cérébral et module l’activité de régions clés comme le cortex préfrontal et l’hypothalamus, impliquées dans la mémoire et les fonctions cognitives.
Avec l’âge, la concentration d’insuline dans le cerveau tend à diminuer, réduisant ainsi la signalisation neuronale et favorisant l’apparition d’une résistance à l’insuline. Ce phénomène est préoccupant, car la sensibilité cérébrale à l’insuline est désormais identifiée comme un facteur clé dans le développement de la maladie d’Alzheimer et d’autres formes de démence. Le diabète et le prédiabète aggravent cette résistance, augmentant le risque de déclin cognitif.
Si des études antérieures ont déjà établi un lien entre activité physique et amélioration des fonctions cognitives — certaines montrant même une augmentation du volume de matière grise, de nouveaux travaux se penchent sur l’impact de l’exercice sur la sensibilité à l’insuline cérébrale. Une recherche récente révèle par exemple qu’après seulement deux mois d’activité physique, de jeunes adultes présentent une meilleure sensibilité à l’insuline au niveau cérébral. De plus, une hausse des niveaux de facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF) a été observée après 16 semaines d’exercice.
Cependant, l’impact de l’activité physique sur les protéines de signalisation de l’insuline, transportées par des vésicules extracellulaires neuronales, reste encore peu exploré. C’est dans ce contexte que des chercheurs de l’Université Rutgers (dans le New Brunswick) ont étudié les effets de l’exercice sur des cellules spécialisées dans la régulation de la réponse à l’insuline. Leurs résultats indiquent que l’activité physique active ces vésicules, suggérant un rôle clé de l’exercice dans l’optimisation des fonctions cérébrales et le risque de démence.
Le rôle clé des vésicules neuronales dans la régulation de l’insuline cérébrale
Les vésicules extracellulaires (VE) sont des acteurs incontournables du transport intercellulaire, véhiculant des protéines essentielles à travers l’organisme. L’équipe de recherche, dirigée par Steven Malin, professeur associé au Département de kinésiologie et de santé de la Rutgers School of Arts and Sciences, en collaboration avec l’Institut national sur le vieillissement des National Institutes of Health (NIH), s’est penchée sur les VE d’origine neuronale. Ces vésicules transportent notamment la protéine Akt, un régulateur clé de la sensibilité à l’insuline.
Les chercheurs ont émis l’hypothèse que l’analyse des modifications des VE neuronales pourrait fournir des indications précieuses sur la physiopathologie de la sensibilité à l’insuline cérébrale. Issues des neurones, ces vésicules franchissent la barrière hémato-encéphalique et sont détectables dans le sang périphérique. « Nos travaux suggèrent que l’exercice peut améliorer la cognition et la mémoire en optimisant l’action de l’insuline dans le cerveau », affirme Malin dans un communiqué.
Pour étayer leurs hypothèses, les chercheurs ont conduit une étude expérimentale impliquant 21 volontaires âgés d’environ 60 ans, tous prédiabétiques. Le programme comprenait 12 séances d’exercices réparties sur deux semaines, à raison de six jours d’entraînement par semaine avec une journée de repos hebdomadaire. Treize participants ont suivi un entraînement continu à 70 % de leur fréquence cardiaque maximale, tandis que huit autres ont alterné des phases d’effort intense (90 %) et modéré (50 %) par intervalles de trois minutes. Chaque séance durait 60 minutes.
Les participants ont consommé une boisson sucrée avant et après chaque séance. Des prélèvements sanguins ont été effectués avant et après l’ingestion de la boisson, ainsi qu’au début et à la fin des entraînements. Publiés dans la revue Aging Cell, les résultats de l’étude montrent une augmentation notable des VE neuronales transportant des protéines liées à la sensibilité à l’insuline après chaque séance. La protéine Akt, en particulier, a montré un rôle important dans ces processus.
« Pour la première fois, nous démontrons que l’exercice physique influence la signalisation de l’insuline via les vésicules extracellulaires neuronales, en corrélation avec des améliorations cliniques de la glycémie », explique Malin. « Ces vésicules pourraient constituer un biomarqueur de la sensibilité cérébrale à l’insuline ».
Si ces résultats ouvrent des pistes intéressantes pour de nouvelles thérapies visant à moduler l’action de l’insuline dans le cerveau, des recherches complémentaires restent nécessaires. Il est notamment nécessaire d’examiner plus en détail l’impact des différentes formes d’exercice sur la composition protéique des VE neuronales.
Dans le cadre de travaux en cours, Malin et son équipe étudient l’effet d’une seule séance d’exercice sur l’efficacité de l’insuline et la santé cognitive chez des adultes âgés en surpoids. L’accent est mis sur le flux sanguin cérébral et l’activité des VE neuronales. Par ailleurs, une étude à long terme est prévue pour évaluer les effets de l’entraînement physique sur la sensibilité à l’insuline cérébrale et ses répercussions sur les fonctions cognitives chez les personnes âgées.