Un regard sans précédent sur des quasars de l’Univers primitif grâce à James Webb

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Vue d’artiste d'une galaxie éloignée avec un quasar actif en son centre. | Nasa, ESA et J. Olmsted (STScI)
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Le télescope spatial James Webb a réussi à observer la lumière stellaire de deux galaxies massives hébergeant des quasars, remontant à moins d’un milliard d’années après le Big Bang. Cette découverte révèle une relation préétablie entre les trous noirs supermassifs et leurs galaxies hôtes, suggérant une évolution conjointe depuis les premiers stades de l’Univers. Cette percée offre de nouvelles perspectives pour comprendre la formation des galaxies et des trous noirs dans l’univers primitif.

Les quasars émettent un rayonnement si intense qu’ils peuvent éclipser la lumière de leurs galaxies hôtes. Ces objets célestes, alimentés par des trous noirs supermassifs, sont parmi les plus énergétiques et les plus lointains de l’univers observable. Cependant, malgré leur luminosité, les galaxies qui les abritent restent souvent cachées dans l’ombre, rendant leur étude un véritable défi pour les astronomes. Les observations précédentes avec le télescope spatial Hubble permettaient de déceler les galaxies hôtes de quasars lumineux lorsque l’univers avait environ 3 milliards d’années, mais pas avant.

Récemment, grâce à la technologie de pointe du télescope spatial James Webb (JWST), des scientifiques internationaux, dont ceux de l’Institut Max Planck d’astronomie, ont réussi à percer ce voile d’obscurité et à capturer des images de la lumière stellaire provenant de deux galaxies primitives massives hébergeant des quasars. Cette avancée, qui nous ramène à moins d’un milliard d’années après le Big Bang, offre un aperçu sans précédent des quasars et de leurs relations avec les trous noirs centraux. L’étude est publiée dans la revue Nature.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Complémentarité des télescopes terrestres et spatiaux

L’étude a utilisé une combinaison d’observations au sol du télescope Subaru et d’observations spatiales du JWST. L’équipe s’est concentrée sur deux quasars, HSC J2236+0032 et HSC J2255+0251, découverts grâce au programme de sondage profond du télescope Subaru. Ces quasars, observés selon leur état lorsque l’univers avait environ 860 millions d’années, sont une occasion en or d’étudier les propriétés de leurs galaxies hôtes primitives.

Les images des quasars ont été capturées à l’aide de l’instrument NIRCam du JWST, qui permet de visualiser des longueurs d’onde infrarouges. En modélisant soigneusement et en soustrayant la lumière du quasar, les galaxies hôtes sont devenues apparentes. En se basant sur la mesure de la luminosité de la galaxie dans certaines longueurs d’onde de la lumière, les auteurs ont pu estimer leur masse, respectivement 130 et 34 milliards de fois la masse du Soleil.

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Image du quasar HSC J2236+0032 prise avec l’instrument JWST NIRCam à la longueur d’onde (proche infrarouge) de 3,6 microns. En arrière-plan, l’image complète, avec le quasar au centre. Encart supérieur : gros plan du quasar et de sa galaxie ; à droite : la même image avec la lumière du quasar soustraite, de sorte que la galaxie hôte devient visible. © Ding, Onoue, Silverman et al., 2023

Des poids lourds du jeune cosmos

En plus de NIRCam, l’équipe a également utilisé le NIRSPEC (Near Infrared Spectrograph) du JWST pour obtenir un spectre de l’un des quasars. Un spectre est une représentation de la lumière d’un objet décomposée en ses différentes couleurs (ou longueurs d’onde). Il faut savoir que le gaz qui entoure ces trous noirs est attiré par leur forte gravité et forme un disque d’accrétion. Comme le gaz du disque tourne très rapidement autour du trou noir, il s’échauffe et émet de la lumière. C’est donc cette lumière qui est analysée pour obtenir un spectre.

Certaines caractéristiques de ce spectre, appelées « raies larges », sont supposément dues au gaz en orbite proche du trou noir d’un quasar. Les propriétés de ces raies larges, telles que leur largeur et leur décalage, sont directement liées à la vitesse à laquelle le gaz orbite autour de l’objet. Plus le trou noir est massif, plus la vitesse du gaz en orbite est élevée. Par conséquent, en analysant les raies larges, les chercheurs peuvent estimer la vitesse du gaz en orbite et, à partir de là, déduire la masse du trou noir.

Dans cette étude, les chercheurs ont utilisé cette méthode pour estimer les masses des trous noirs des deux quasars : 1,4 milliard et 200 millions de masses solaires, respectivement. Pour mettre cela en perspective, le trou noir au centre de la Voie lactée a une masse d’environ 4 millions de masses solaires. Cela montre à quel point ces trous noirs de quasars sont massifs, même par rapport à d’autres trous noirs supermassifs.

Quasars et galaxies hôtes : une relation préétablie

Le rapport entre la masse du trou noir et celle de la galaxie hôte dans ces galaxies hôtes de quasars précoces reflète celui des galaxies dans l’univers plus récent. En effet, dans l’univers actuel, nous observons que les galaxies massives ont tendance à héberger des trous noirs supermassifs en leur centre.

Le fait que cette relation semble exister aussi tôt dans l’histoire de l’univers suggère que les processus qui conduisent à la formation de ces systèmes intégrés de galaxies et de trous noirs ont commencé très tôt. Ils étaient déjà en place dès 860 millions d’années après le Big Bang selon cette nouvelle étude — et donc peut-être même avant.

Afin de comprendre les mécanismes sous-jacents à cette croissance conjointe, l’équipe prévoit de poursuivre ses recherches en utilisant les observations du Cycle 1 prévues par le JWST. Elles visent à identifier des cibles similaires en utilisant l’instrument MOSFIRE de l’Observatoire W. M. Keck, élargissant ainsi l’échantillon de galaxies anciennes hébergeant des quasars dans l’univers primitif.

Source : Nature

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