Une IA propose un modèle de batterie avec 70 % moins de lithium

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Une technique basée sur l’IA a permis de développer une nouvelle conception de batterie nécessitant jusqu’à 70 % moins de lithium que les modèles actuels. Cette technique a notamment permis d’identifier 18 nouveaux matériaux prometteurs pour substituer au moins en partie le lithium, parmi des millions de candidats — en seulement quelques mois depuis leur prédiction jusqu’à l’évaluation expérimentale de leurs performances.

La plupart des appareils électroniques que nous utilisons ainsi que les véhicules électriques sont alimentés par des batteries lithium-ion. Ces dernières sont également essentielles au stockage de l’énergie fournie par les dispositifs énergétiques renouvelables, tels que les éoliennes et les panneaux solaires. Cependant, l’extraction minière de ce métal alcalin a un coût financier et environnemental considérable, ce qui alimente la controverse quant aux réels avantages écologiques des technologies d’énergie verte.

En effet, l’extraction du lithium s’effectue exclusivement à partir de minerais de roche dure et de saumures continentales, ces dernières constituant la source la plus abondante. Afin d’en extraire du lithium, un processus d’évaporation à l’air libre est effectué pour concentrer la saumure. Ce procédé rejette entre 100 et 800 mètres cubes d’eau par tonne de carbonate de lithium extrait, ce qui soulève inévitablement des inquiétudes quant à sa durabilité.

D’un autre côté, la concentration de la saumure continentale est un processus lent prenant entre 10 et 24 mois, sans compter que les emplacements géographiques des gisements sont restreints. Cela signifie que l’offre disponible ne peut répondre aux fluctuations à court terme de la demande, créant ainsi un cycle de dépendance au minerais.

En vue des enjeux environnementaux, les recherches se concentrant sur les alternatives potentielles au lithium gagnent de l’ampleur. Au cours des dernières décennies, différentes méthodes informatiques ont été développées à cette fin, notamment dans le but de prédire de nouveaux matériaux et de comprendre leurs propriétés. Cependant, identifier des substituts viables reste coûteux et chronophage avec les technologies de modélisation informatique conventionnelles.

D’autre part, les avancées en matière d’IA ont ouvert la voie à la découverte de nouveaux composés en des temps record. Dans le cadre de leur nouvelle étude, prépubliée sur le serveur arXiv, une équipe de Microsoft et du Pacific Northwest National Laboratory (aux États-Unis) a exploré cette voie afin de développer des alternatives de stockage énergétique moins dépendantes du lithium.

18 candidats prometteurs en seulement 80 heures

Au cours des dernières années, les progrès en matière d’IA ainsi que l’établissement de grandes bases de données publiques telles que le Materials Project du Berkeley Lab (le référentiel d’informations en libre accès le plus utilisé au monde pour les matériaux inorganiques) ont créé des opportunités inédites dans ce qui évoque une nouvelle ère de découverte de matériaux.

Ces outils permettent désormais de caractériser et de prédire très rapidement le comportement de millions de composés, en évaluant par exemple leur stabilité géométrique et thermodynamique. « L’avantage significatif de la vitesse des techniques basées sur l’apprentissage automatique par rapport à la simulation directe, a permis d’explorer des matériaux à travers un vaste espace chimique qui dépasse considérablement le nombre de matériaux connus », expliquent les chercheurs de la nouvelle étude dans leur document. Parmi les progrès les plus impressionnants dans ce sens figure l’IA GNoME de Google DeepMind, qui, en s’appuyant sur un laboratoire autonome, a permis de synthétiser 41 nouveaux composés inorganiques en seulement 17 jours.

Cependant, bien que les laboratoires autonomes permettent de synthétiser directement les matériaux, leurs propriétés fonctionnelles restent à démontrer de manière empirique. En outre, l’évaluation fonctionnelle des candidats potentiels nécessite encore d’importantes ressources informatiques. Afin de surmonter ce défi, les experts de la nouvelle étude ont combiné la puissance de traitement de données de l’apprentissage automatique et le calcul haute performance dans le cloud (HPC), un type de cloud computing qui combine un grand nombre d’ordinateurs pour effectuer des tâches scientifiques et mathématiques complexes.

Dans cette vision, l’équipe s’est concentrée sur la recherche de nouveaux électrolytes solides pouvant substituer le lithium des batteries. Ils ont d’abord sélectionné plus de 32 millions de matériaux candidats inorganiques potentiels en remplaçant la proportion d’atomes de lithium par d’autres éléments. L’algorithme d’IA a ensuite effectué des étapes de sélection par élimination, en évaluant notamment la stabilité et la performance des combinaisons proposées lorsqu’elles sont appliquées aux batteries. En s’appuyant sur le HPC, 18 candidats prometteurs ont été identifiés en seulement 80 heures.

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Distribution de la composition et de la structure des matériaux de substitution au lithium. © Chi Chen et al.

Après des étapes supplémentaires de sélection, un candidat s’est démarqué par sa très faible dépendance au lithium (une réduction de 70% par rapport aux batteries conventionnelles). La majorité des atomes de lithium a notamment été remplacée par du sodium, un élément abondant dans la nature et plus facilement exploitable. Toutefois, en fabriquant une batterie avec le matériau en question, la conductivité observée est restée inférieure à celle des batteries contenant davantage de lithium.

Néanmoins, bien que plus de recherches soient nécessaires afin d’optimiser les combinaisons possibles, l’ensemble du processus, de la prédiction à l’évaluation expérimentale du fonctionnement, a duré environ 9 mois — ce qui constitue déjà un exploit en soi. « Qu’il s’agisse ou non d’une batterie viable à long terme, la rapidité avec laquelle nous avons trouvé une chimie de batterie utilisable est assez convaincante », a conclu dans un communiqué Brian Abrahamson Bilodeau, coauteur de l’étude et directeur des technologies numériques au Pacific Northwest National Laboratory.

Source : arXiv

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