De (très) rares images de tardigrades en train de s’accoupler en trio

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| James Weiss
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Les tardigrades, ces fascinantes créatures microscopiques, continuent de susciter l’interrogation quant à leur mode de vie. James Weiss, vidéaste renommé spécialisé dans le monde microscopique, a récemment capturé des images rares montrant un trio de tardigrades en train de s’accoupler, révélant une facette de leur reproduction beaucoup plus complexe qu’on ne l’imaginait.

Les tardigrades constituent un groupe d’invertébrés aquatiques composé de 1300 espèces, terrestres et aquatiques, mesurant entre 50 micromètres et 1,2 millimètre de long. Se déplaçant lentement sur leurs huit petites pattes munies de « griffes », leur allure pataude leur a valu les surnoms « ours d’eau » et « porcelet de mousse ».

Largement étudiés par les scientifiques en raison de leur incroyable résistance aux environnements extrêmes, les tardigrades sont des fossiles vivants, existant depuis plus de 540 millions d’années. Des recherches ont montré qu’ils peuvent survivre à des températures allant de -273 °C à 340 °C, à de fortes radiations, aux énormes pressions des profondeurs marines et bien plus encore. Ces capacités leur permettent d’exister dans presque tous les environnements, tels que les plus hauts sommets montagneux et les fonds abyssaux. Des expériences ont également montré qu’ils pouvaient survivre au vide spatial.

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Toutefois, si nous en savons beaucoup sur leur capacité à survivre dans des conditions extrêmes, leur mode de reproduction demeure en grande partie méconnu. Certaines espèces de tardigrades se reproduisent par parthénogenèse (sans fécondation), tandis que d’autres sont bisexuées. Des recherches antérieures ont révélé que ces dernières réalisent des accouplements longs et jalonnés d’étapes étonnamment complexes. Grâce à son expertise en vidéographie microscopique, Weiss a exploré mers, lacs et rivières pendant des semaines pour filmer des tardigrades s’accouplant durant près de deux heures d’affilée.

Un rituel de reproduction complexe

Après leur éclosion, les jeunes tardigrades atteignent leur maturité sexuelle en deux semaines et subissent trois mues au cours de leur vie. Lors de l’une de ces mues, la femelle détache sa cuticule externe, où ses œufs ont été préalablement déposés. Pour les féconder, le mâle se positionne autour de la femelle, tel un crochet. Afin d’inciter le mâle à éjaculer, la femelle secoue et contracte frénétiquement sa trompe, appuyant sur la partie abdominale de son partenaire.

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Deux tardigrades en train de s’accoupler. © James Weiss

Si la stimulation est réussie, le mâle éjecte son sperme par une petite ouverture située au-dessus de son anus. La femelle sort ensuite ses œufs pour les féconder. Cette éjaculation peut durer jusqu’à une heure. Si elle n’a pas lieu, la femelle réabsorbe ses œufs dans sa cuticule, puis attend un moment plus propice.

Un accouplement en groupe

Les tardigrades sont connus pour s’accoupler en groupe, des archives photographiques ayant montré des accouplements comprenant jusqu’à cinq mâles pour une femelle. « Je n’étudie pas les tardigrades de manière traditionnelle et institutionnelle, mais comme je m’y intéresse depuis longtemps, j’ai rassemblé beaucoup de données et observé des comportements uniques », explique Weiss.

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Les plus anciennes archives photographiques des tardigrades montrent un accouplement avec cinq mâles et une femelle. © Wanda von Wenk, 1914

Dans ses images, le vidéaste a d’abord remarqué que deux petits tardigrades étaient particulièrement attirés par le ventre d’un autre, plus grand (celui de la femelle). Ce comportement inhabituel n’a été observé que lorsqu’ils recherchent de la nourriture. Les deux petits mâles se sont ensuite accrochés à la femelle, l’un se détachant au bout de 30 minutes et l’autre après deux heures.

D’après Weiss, cette attraction serait stimulée par des signaux chimiques, car la femelle excrétait abondamment pendant que les mâles continuaient à la piquer frénétiquement. En effet, dans l’eau, les tardigrades mâles détectent les femelles portant des œufs non fécondés grâce à des signaux chimiques. Pour tester son hypothèse, le vidéaste a manuellement séparé des couples de tardigrades, qui se sont retrouvés après seulement quelques minutes. « Je pense donc qu’il y a une signalisation chimique, et la défection libère beaucoup de signaux dans l’eau », suggère-t-il.

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La défection de la femelle véhiculerait des signaux chimiques destinés aux mâles. © James Weiss

Weiss estime également que les tardigrades pourraient adapter leur mode de reproduction à leur environnement et que cela pourrait varier en fonction du stress qu’ils subissent. Par ailleurs, une étude a révélé que la température peut influencer le cycle biologique de l’animal. Des expériences menées à 12 et 20 °C sur l’espèce Je. Dastychi ont montré qu’à ces deux températures, il y a trois mues jusqu’à l’âge adulte, avec des phases de croissance inter-mue. Dans le cadre de l’expérience, les tardigrades vivant à 12 °C ont atteint l’âge adulte plus tard et étaient également plus gros que ceux vivant à 20 °C. Ces résultats suggèrent que le mode de vie et le cycle biologique de l’animal sont davantage déterminés par son environnement, plutôt que par son âge ou sa taille.

La femelle tardigrade peut porter une vingtaine d’œufs qui éclosent un à un après avoir été fécondés, arrivés à terme. La durée de vie la plus longue observée par Weiss chez cet animal est de huit semaines.

La vidéo montrant le trio de tardigrades en train de s’accoupler :

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